Le statut d'étranger et le droit au renouvellement d'un bail commercial
La question du statut d’étranger dans les règles du bail commercial ne respecte pas les principes d’égalité et de non-discrimination. Mais la jurisprudence a récemment tenté de faire réagir le législateur afin que ces normes en tiennent compte.
Plus précisément, l’évolution concerne la possibilité pour une personne ayant le statut d’étranger de voir son bail commercial renouvelé.
Ainsi, un commerçant de nationalité étrangère a-t-il droit au renouvellement de son bail commercial ?
Actuellement, l’article L145-13 du code de commerce exclut les commerçants étrangers du droit au renouvellement d’un bail commercial, mais la Cour de cassation a récemment déclaré ce principe contraire à la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales dans une décision du 9 novembre 2011. Cette décision va également bientôt être consacrée par le législateur.
La condition de nationalité exprimée par l’article L145-13 du code de commerce
L’article L145-13 du code de commerce énonce le principe selon lequel le droit au renouvellement d’un bail commercial ne peut être invoqué par des commerçants de nationalité étrangère.
Ainsi selon cet article, le droit au renouvellement, principe pourtant inhérent au statut protecteur du bail commercial, est un droit réservé aux commerçants de nationalité française.
Toutefois l’article L145-13 du code de commerce admet de nombreuses exceptions, de sorte qu’il est facile de déroger à l’exclusion des étrangers concernant ce droit.
Par ailleurs, la condition de nationalité du commerçant s’exprime au jour de la demande de renouvellement de telle sorte que lorsque le commerçant étranger acquiert la nationalité française en cours de bail, il est en droit de demander le renouvellement (Cass., com., 13 avril 1961).
En outre, le commerçant étranger peut contourner cette exclusion du droit au renouvellement par la création d’une société française, à laquelle il cèderait son bail commercial.
Ainsi, le code de commerce a posé le principe d’exclusion des commerçants étrangers du droit au renouvellement de leur bail commercial. Mais la Cour de cassation a estimé par un arrêt du 9 novembre 2011 que cette disposition était discriminatoire.
La condition de nationalité estimée contraire à la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales par la Cour de cassation
La 3ème chambre civile de la Cour de cassation, par un arrêt du 9 novembre 2011 a jugé le principe posé par l’article L145-13 du code de commerce contraire à l’article 1er du 1er protocole additionnel de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales. Selon les juges de la haute juridiction, ce principe constitue une discrimination prohibée par l’article 14 de cette même convention.
En l’espèce un bailleur se prévalait de l’article L145-13 du code de commerce pour refuser le renouvellement de son bail commercial à un locataire de nationalité turque.
La Cour de cassation refuse donc l’application de cet article pour non respect des principes de la convention précitée, entrée en vigueur le 3 septembre 1953.
Vers la possibilité pour les commerçants étrangers de demander le renouvellement de leur bail commercial
Le projet de loi Pinel relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, voté en première lecture par l’Assemblée Nationale le 18 février 2014, et transmis au Sénat, vise à abroger les articles L145-13 (exclusion du droit au renouvellement pour les commerçants étrangers) et L145-23 (exclusion du droit de reprise par les bailleurs étrangers) du code de commerce, afin de consacrer la décision prise par la Cour de cassation.
Ainsi, des commerçants étrangers pourront désormais obtenir la protection offerte par le statut des baux commerciaux visant à faciliter le renouvellement de leur bail commercial. Et des bailleurs étrangers pourront également refuser le renouvellement du bail exclusivement sur la partie concernant les locaux d'habitation accessoires des locaux commerciaux pour habiter eux-mêmes ceux-ci ou les faire habiter par leur conjoint, leurs ascendants, leurs descendants ou ceux de leur conjoint.
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